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LA MÈRE

Écoute !… Non… Pour Dieu, demeure donc en place !

LE PÈRE

Eh ! je n’ai pas ton calme devant ta filasse !
Libre à toi de rester à l’attendre en rêvant !
Moi, je m’agite ! Moi, j’aime bien mon enfant !
Et j’ai l’impression, lorsque je te regarde,
Que c’est ce calme indifférent qui le retarde !

LA MÈRE (tranquillement)

C’est entendu. Mais tous ces gestes et ces mots
Ne le ramèneront pas une heure plus tôt ;
Et pour penser à lui comme mon cœur y pense
J’ai besoin de mon calme, et j’aime mon silence.

LE PÈRE (avec bonté)

Je suis brusque… Cela m’énerve !…

LA MÈRE

Je suis brusque… Cela m’énerve !… Pourquoi donc ?
Depuis deux ans qu’il est parti, nous l’attendons !
Il n’avait pas franchi le portail de la cour
Que j’avais l’anxieux désir de son retour !
C’est vrai, j’ai dédaigné les plaintes inutiles,
Mais depuis son départ ma vie est immobile.
On dirait que le ciel, durant des jours sans nombre,
A mis sur la maison la tristesse d’une ombre