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Par le pressentiment du monde merveilleux
Dont les Alpes cachaient le sourire à leurs yeux !
Touchant au but, enfin, tels de petits garçons,
Ils allaient à l’école et prenaient des leçons.
Leurs maîtres s’appelaient — sans parler des anciens —
Raphaël, Léonard de Vinci, le Titien !
Attentifs à copier les fresques et les toiles,
Ils sentaient, peu à peu, comme on voit les étoiles
Une à une éclairer l’obscurité des nues,
S’allumer dans leur cœur des flammes inconnues !
Après deux ans, trois ans, d’efforts et de combats,
Ils reprenaient le long chemin des Pays-Bas,
Mais des clairs souvenirs de ces quelques années
Leur existence entière était illuminée !
À tel point que ce beau Flamand, ce grand Floris
Dont je citais le nom tantôt, disait jadis,
— Lui qui pourtant connut tous les succès des hommes —
Que son plus fier bonheur était d’avoir, à Rome,
Mêlé des pleurs de joie aux cris de ses louanges,
Le jour de la Noël où le vieux Michel-Ange,
Libérant à jamais ses titans prisonniers,
Fit tomber le rideau du Jugement dernier !

KAATJE (avec un cri d’admiration)

Ah ! Jean !

JEAN

Ah ! Jean !Dis, comprends-tu maintenant que mon cœur
Veuille connaître aussi le goût de ce bonheur.