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brûlots, et il en a cuit à quelques-uns qui n’étaient ni des vrais poètes, ni des artistes. Mais notre pitié pour les maîtres de notre élection n’en fut que plus émue, si notre religion indépendante se gardait de la servilité ostentatoire où se complaît envers Hugo le culte mortuaire de M. Catulle Mendès.

Cette indépendance, cette volonté d’être nous-mêmes n’enlevait rien à notre vénération. « Effacement de rien qui ait été beau dans le passé », recommandait Stéphane Mallarmé. Et non seulement nous n’avons rien effacé, mais nous avons ressuscité les victimes des romantiques. C’est autant aux symbolistes qu’à M.Jules Lemaître que le culte de Racine doit d’avoir revécu. Nous pouvions dire comme André Chénier :

Les poètes vantés

Sans cesse avec transport lus, relus, médités ;

Les Dieux, l’Homme, le Ciel, la Nature sacrée,

Sans cesse étudiée, admirée, adorée :

Voilà nos maîtres saints, nos guides éclatants.

Quelques trouvères, Villon, Ronsard, Racine, Chénier, Hugo, Lamartine, Vigny, Gérard de Nerval, Baudelaire, Mallarmé, Verlaine, puis les poètes populaires, les nôtres et les autres, ajoutez quelques prosateurs, composèrent la chaîne de nos initiations diverses. Mais nous proclamions en même temps avec le même André Chénier :

Dans ce bel art des vers, je n’ai point eu de maître,

Il n’en est point, ami.

Et nous inscrivions sur nos livres ces paroles de Victor Hugo : « Admirons les grands maîtres, ne les imitons pas.