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Des fleurs de ma terrasse,

Des fleurs comme au feuillet d’un livre,

Des fleurs, pourquoi ?

Voici un peu de nous, la chanson basse

Qui tourne et tombe,

— Comme ces feuilles-ci tombent et tournoient —

Voici la honte et la colère de vivre

Et de parler des mots — contre ta tombe.

« Mais lorsque Théophile Gautier était mort, Victor Hugo avait chanté, sur un rythme solide, aux fortes rimes, des vers dont voici quelques-uns :

Je te salue au seuil désiré du tombeau !

Va chercher le vrai, toi qui sus trouver le beau.

Monte l’âpre escalier. Du haut des sombres marches,

Du noir pont de l’abîme on entrevoit les arches.

Va ! meurs ! la dernière heure est le dernier degré !

Pars, aigle, tu vas voir des gouffres à ton gré ;

Tu vas voir l’absolu, le réel, le sublime ;

Tu vas sentir le vent céleste de la cime

Et l’éblouissement du prodige éternel.

Ton Olympe, tu vas le voir du haut du ciel ;

Tu vas, du haut du vrai, voir l’humaine chimère,

Même celle de Job, même celle d’Homère,

Ame, et du haut de Dieu tu vas voir Jéhovah !

Monte ! esprit ! grandis, plane, ouvre tes ailes, va !..

(Toute la Lyre). « Gloire à la « rime ! » (L’Art des Vers, p. 187 à 189).

M. Dorchain ne pouvait choisir meilleurs exemples… contre sa thèse. Victor Hugo tout entier est dans ces quelques vers avec sa grande allure, mais aussi son verbalisme, sa pensée décorative sans frémissement. Et que le rôle de la rime est ici fâcheux ! Comme il pousse à des remplissages d’autant plus pénibles qu’on ne s’attendait point ici à de simples arabesques funèbres. On surprend à nu la tyrannie de la vieille rime dans tout son dévoiement de la sensibilité.