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Musset. D’où vient qu’avec et depuis ces deux grands poètes ils avaient, dans leur expression directe, perdu toute force d’art, toute vertu esthétique ? C’est que le « sentiment » inspirateur s’étantenflé, transformé en « éloquence », avait faussé, magnifiquement si l’on veut, mais faussé sa spontanéité primitive et cette simplicité jamais dévoyée dans la plus tragique passion que garde l’inspiration populaire.

On peut hardiment avancer d’ailleurs que jusqu’à Verlaine le véritable lyrisme sentimental ne fût point, pour ainsi dire, connu en France. On en trouve juste des traces à travers toute la moisson de nos poètes, glanes prises presque à leur dédain, de quoi lier à peine quelques gerbes d’œuvre en œuvre, au seizième siècle et dans le nôtre. La mode idyllique créée par Rousseau, mêlée à la vogue des parcs anglais, des élégiaques latins, créa dans la seconde moitié du xvme siècle des sortes de pastorales composites dont l’érotique innocence et le maniérisme s’éloignaient