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dans un malheur involontaire ; et qui a couronné d’épines des cheveux blanchis !

Les deux sœurs s’appellent Françoise et Madeleine ; leur voyage d’aujourd’hui est un coup d’audace sans exemple dans leur vie. La fièvre du siècle les a gagnées à leur insu. Hier Madeleine a subitement jeté cette idée de promenade, Françoise l’a accueillie sur-le-champ. Peut-être eût-il mieux valu ne point céder à la tentation offerte par la jeune sœur ; mais « on fait des folies à tout âge, » comme le remarque philosophiquement la prudente Françoise. Quant à Madeleine, elle ne regrette rien ; c’est le mousquetaire du ménage.

— Il faut bien s’amuser, dit-elle, « on ne vit qu’une fois. »

Et la sœur aînée sourit à cette maxime épicurienne. Il est évident que toutes deux sont dans une crise d’indépendance.

Du reste, ce serait grand dommage que le regret vînt déranger leur joie ! elle est si franche, si expansive ! La vue des arbres qui semblent courir des deux côtés de la route leur cause une incessante admiration. La rencontre d’un train qui