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reléguons-le dans mon tiroir le plus profond.

En passant devant ma glace, j’ai aperçu plusieurs cartes de visites complaisamment étalées le long de l’encadrement. Par quel hasard n’y a-t-il là que des noms qui peuvent faire figure ?… Voici un comte polonais… un colonel retraité… le député de mon département… Vite, vite, au feu ces témoignages de vanité! et mettons à la place cette carte écrite à la main par notre garçon de bureau, cette adresse de dîners économiques, et le reçu du revendeur auquel j’ai acheté mon dernier fauteuil. Ces indications de ma pauvreté sauront, comme le dit Montaigne, mater ma superbe, et me rappelleront sans cesse à la modestie qui fait la dignité des petits.

Je me suis arrêté devant les gravures accrochées au mur. Cette grosse Pomone qui rit assise sur des gerbes, et dont la corbeille ruisselle de fruits, ne fait naître que des idées de joie et d’abondance ; je la regardais l’autre jour lorsque je me suis endormi en niant la misère ; donnons-lui pour pendant ce tableau de l’hiver où tout exprime la tristesse