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Près de moi s’est trouvé un spectateur aux joues creuses et aux yeux ardents, dont l’habit noir montrait la corde. Il suivait d’un regard d’envie ces privilégiés de l’autorité ou de la gloire, et je lisais sur ses lèvres, que crispait un sourire amer, tout ce qui se passait dans son âme.

— Les voilà, les heureux ! pensait-il ; à eux tous les plaisirs de l’opulence et toutes les jouissances de l’orgueil. La foule sait leurs noms ? ce qu’ils veulent s’accomplit ; ils sont les souverains du monde par l’esprit ou par la puissance ! pendant que moi, pauvre et ignoré, je traverse péniblement les lieux bas, ceux-ci placent sur les sommets dorés par le plein soleil de la prospérité.

Je suis revenu pensif. Est-il vrai qu’il y ait ces inégalités, je ne dis pas dans les fortunes, mais dans le bonheur des hommes ? Le génie et le commandement ont-ils véritablement reçu la vie comme une couronne, tandis que le plus grand nombre la recevait comme un joug ? La dissemblance des conditions n’est-elle qu’un emploi divers des natures et des facultés, ou une inégalité réelle entre les lots humains ? Question sérieuse, puisqu’