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de ma vie ! Pour mériter d’y prendre part, il fallait longtemps d’avance se montrer laborieux et soumis. Je me rappelle encore avec quels ravissements d’espérance je me levais ce jour-là! Une sainte allégresse était dans l’air. Les voisins, éveillés plutôt que de coutume, tendaient, le long de la rue, des draps parsemés de bouquets ou des tapisseries à personnages. J’allais de l’une à l’autre, admirant, tour à tour, les scènes de sainteté du moyen âge, les compositions mythologiques de la renaissance, les batailles antiques arrangées à la Louis XIV, et les bergeries de madame de Pompadour. Tout ce monde de fantômes semblait sortir de la poussière du passé pour venir assister, immobile et silencieux, à la sainte cérémonie. Je regardais, avec des alternatives d’effroi et d’émerveillement, ces terribles guerriers aux cimeterres toujours levés, ces belles chasseresses lançant une flèche qui ne partait jamais, et ces gardeurs de moutons en culottes de satin, toujours occupés à jouer de la flûte aux pieds de bergères éternellement souriantes. Parfois, lorsque le vent courait derrière ces tableaux mobiles, il me semblait