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L’âme ressemble à ces lampes voilées qui, malgré tout, jettent au dehors une lueur adoucie. Si les goûts ne trahissaient point le caractère, ce ne seraient plus des goûts, mais des instincts.

En rangeant tout dans ma mansarde, mes yeux se sont arrêtés sur l’almanach de cabinet suspendu à ma cheminée. Je voulais m’assurer de la date, j’ai lu ces mots écrits en grosses lettres : Fête-Dieu !

C’est aujourd’hui ! Rien ne le rappelle dans notre grande cité où la religion n’a plus de solennités publiques ; mais c’est bien l’époque si heureusement choisie par la primitive Église, « La fête du Créateur, dit Chateaubriand, arrive au moment où la terre et le ciel déclarent sa puissance, où les bois et les champs fourmillent de générations nouvelles ; tout est uni par les plus doux liens ; il n’y a pas une seule plante veuve dans les campagnes. »

Que de souvenirs ces mots viennent d’éveiller en moi ! Je laisse là ce qui m’occupait ; je viens m’accouder à la fenêtre, et, la tête appuyée sur mes deux mains, je retourne, en idée, vers la petite ville où s’est écoulée ma première enfance.

La Fête-Dieu était alors un des grands événements