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poésies de la bretagne.

prise d’un vertige, elle courait, se maudissant, appelant les enfans, fuyant pour être poursuivie, répétant les couplets accusateurs ; et à mesure que sa voix s’élevait, la chanson semblait la prendre plus fortement en sa possession : on eût dit que le remords s’incarnait en elle ; qu’il se formait dans son être deux êtres, dont l’un avait mission de torturer l’autre, et que sa conscience furieuse donnait la chasse à son âme. Tous ses traits, tous ses gestes, exprimaient ce double rôle de vengeresse et de victime. Elle pleurait et rugissait, demandait grâce, et lançait des malédictions : c’était un spectacle tel qu’on n’en peut voir sans fermer les yeux : la lutte du bourreau et du condamné sur le bord de l’échafaud.