Page:Souvestre - Les Derniers Bretons (tome 2), 1836.djvu/179

Cette page a été validée par deux contributeurs.
177
poésies de la bretagne.

fille parut, elle entendit répéter le chant vengeur. Son supplice ne fut plus un supplice ordinaire, ayant son terme et son lieu ; il passa dans le domaine public, il entra dans les mœurs. Elle marcha, semblable à Caïn, avec la marque fatale au front, au milieu d’hommes qui, comme autant de piloris vivans, lui chantaient son crime et la maudissaient. En vain voulut-elle fuir sa paroisse ; partout où pouvait arriver une brise, partout où pouvait parvenir la voix du pâtre, le refrain terrible retentissait.

Un jour (c’est elle-même qui l’a raconté) elle rencontra dans un champ, loin d’Auray, un petit garçon de cinq à six ans qui jouait avec des marguerites. Elle s’approcha, et s’assit à ses côtés. Pour elle, malheureuse abandonnée, qui depuis un an n’avait touché la main de personne, c’était une grande