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les derniers bretons.

enfans, et de les porter ainsi, raides et bleus, jusqu’à la terre sainte, sans suite de parens, sans prêtres, sans cierges allumés, comme pour une promenade insignifiante et ordinaire. Quand venait le soir, c’était un spectacle dont rien ne peut donner l’idée, que de voir, le long de nos routes creuses et ombragées, ces charrettes couvertes d’un drap blanc, et que suivait une foule silencieuse de femmes, enveloppées dans de longs manteaux noirs à capuchons, et d’hommes, la tête nue et demi-voilée sous leurs cheveux épars. On n’entendait que le tintement triste et monotone de la clochette des chevaux, les gémissemens sourds de l’épouse ou de la fille qui, suivant l’usage, accompagnait la châsse jusqu’à la fosse ; le son éloigné d’un glas d’église qui semblait appeler le mort ; et, au milieu de tout ce mélange de rumeurs mystérieuses et déchirantes, le sombre cor-