Page:Souvestre - Les Derniers Bretons (tome 1), 1836.djvu/83

Cette page a été validée par deux contributeurs.
31
la bretagne et les bretons.

rien sous le ciel de plus déchirant que cette courageuse tendresse d’un pauvre abandonné, conduisant jusqu’à la fosse le cadavre de celui qu’il aima. Ce luxe de douleur a quelque chose qui saisit le cœur et le brise. C’est devant de tels enterremens que l’on se sent encore entraîné à découvrir sa tête et à fléchir le genou ; car, qui oserait afficher l’incrédulité ou la raillerie devant les yeux de cet homme qui n’a plus d’espoir que dans les idées de rémunération et d’immortalité ! Et ne croyez pas que les honneurs rendus à ses morts par le Léonard finissent aussitôt son tombeau fermé ; non, des messes seront dites encore long-temps pour le repos de l’âme de celui qu’il pleure. Chaque dimanche il viendra prier sur sa tombe et marquer de ses deux genoux une place qu’il a peut-être été trop pauvre pour marquer autrement. Qui manquerait à ce devoir