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les derniers bretons.

Et puis tout respirait autour de moi un bon air de féodalité, non celle du xve siècle, brutale encore et la dague au poing, mais de cette gentilhommerie bénigne et campagnarde du xviiie siècle, qui ne se faisait guère sentir que par l’aumône et par quelques innocentes vanités ; véritable aristocratie d’opéra-comique, avec ses fêtes de village, ses rosières dégourdies et ses paysans rusés. C’est qu’en effet le pays de Tréguier a conservé cette physionomie nobiliaire effacée partout ailleurs. Il semble que là où le temps a laissé le plus de ruines du moyen âge, où les souvenirs guerriers sont le plus nombreux, la féodalité ait passé plus vite, usée rapidement par son action violente sur les populations. Ce n’est point dans les Côtes-du-Nord qu’il faut chercher ces rudes gentilshommes restés fidèles aux traditions de leurs familles, et qui, retirés dans leurs