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la bretagne et les bretons.

ce qu’il fallait pour nourrir sa faim, et rejetait avec dédain l’argent qu’on lui offrait. Jamais, depuis sa folie, sa main ne s’était étendue pour demander ou serrer une autre main ; jamais une parole autre que celle de saints conseils ou de prophétiques menaces n’était tombée de ses lèvres. Par les nuits d’hiver les plus sombres, les plus froides, lorsque le givre ou la neige l’avaient surpris dans quelque chemin désert et l’empêchaient de dormir sur son lit de pierre, il restait debout, le chapelet à la main et chantant des cantiques en langue bretonne. Souvent le paysan attardé avait entendu de loin cette voix singulière, et avait avec effroi fait rebrousser chemin à sa monture. On ajoutait dans le pays qu’une prescience miraculeuse avait été accordée à Ioan par les intelligences célestes, et qu’à l’heure ou la mort frappait à la porte d’une maison, le