— En effet, répliqua le voyageur.
— J’en étais sûr, reprit Blaguefort avec onction ; quand on approche les saints, il y a une voix intérieure qui vous avertit ! Mais puisque la Providence m’a fait rencontrer monsieur, j’ose espérer qu’il me permettra de lui offrir quelques objets destinés à l’édification des fidèles : Ad majorem Dei gloriam.
Et prenant subitement la voix d’un commissaire-priseur, il continua, en présentant tour à tour chaque échantillon :
— Ceci est une relique de saint Loriquet, destinée à inspirer les vraies connaissances historiques ! Nous ne les vendons que 50 centimes la douzaine, qui est de quatorze.
Ceci est une médaille dédiée aux saints protecteurs ; elle met à l’abri des banqueroutes, de la garde nationale et autres infirmités terrestres. 1 fr. les sept-six.
Ceci est un chapelet…
— Un moment, monsieur, interrompit le voyageur en cheveux longs, il y a méprise ; je ne suis point prêtre catholique…
— Ah bah ! s’écria Blaguefort, alors c’est à un ministre du saint Évangile que j’ai l’honneur de parler ?
Il rouvrit précipitamment sa trousse, y choisit une Bible, et reprit, avec l’air majestueux d’un maître d’école qui explique les neuf parties du discours :
— Prenez, car ceci est la loi universelle, le grand Verbe, le Dieu vivant ! Là, vous ne verrez que des règles sûres… bien que nous ayons ajouté les livres apocryphes. Vous y trouverez la recette du salut spirituel et temporel… avec le moyen de s’en servir. Le tout ne coûtant que 10 francs, compris le fermoir et l’étui !
— C’est, en effet, bien peu d’argent pour tant de choses,