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Ici commence un monologue pantomime du caïman qui exprime sa douleur par tous les moyens à son usage : il pousse des gémissements, saisit sa tête à deux pattes, comme s’il voulait s’arracher les cheveux, se roule à terre, où il reste enfin suffoqué de douleur.

Mais il est arraché à cette espèce d’évanouissement par le bruit du tambour : c’est l’armée française qui vient de débarquer à l’île des caïmans.

On voit bientôt arriver l’avant-garde, tambour-major en tête. Le crocodile court à sa rencontre, et, par ses gestes, il engage les soldats à le suivre pour délivrer leur général. Mais les Français, qui ne comprennent point son langage, et que l’expérience a rendus défiants à l’endroit des crocodiles, croisent la baïonnette. Moïse, désespéré, veut s’échapper, on en conclut que c’est un traître, et il est arrêté. Au même instant, un officier aperçoit la miniature échappée aux mains d’Astarbé et dit :

Le portrait de Kléber !… plus de doute possible.
Ce monstre a dévoré notre chef invincible.

Les soldats, furieux, poussent des cris de mort, et Moïse est emmené pour être fusillé.

Sortie militaire sur l’air : On va lui percer le flanc.

SIXIÈME TABLEAU.

Nous sommes dans le palais du soudan ; Kléber est enfermé dans un cachot donnant sur le fleuve, et travaille à un ballon qui doit assurer sa délivrance.

Au milieu de beaucoup de réflexions personnelles, cette fabrication lui inspire une réflexion générale.

De la science humaine, admirable influence !
Le barbare ignorant me croit en sa puissance,
Mais l’art de Montgolfier se rit d’un tyran vil ;
Quelque rusé qu’il soit, le gaz est plus subtil.