Page:Souvestre - Au bord du lac, 1852.djvu/66

Cette page a été validée par deux contributeurs.
53
le serf.

— Voici pour lui, Jehan, reprit Catherine en déployant le lambeau de toile qui enveloppait le beurre.

Jehan sourit.

— Merci, bonne Catie, merci, dit-il ; ce sera aujourd’hui jour de régal, car j’ai là déjà de quoi lui rendre des forces.

Qu’est-ce donc, Jehan ?

— Voyez.

Il découvrit la marmite suspendue sur le feu. La jeune fille avança la tête, et, soufflant la vapeur qui s’en échappait afin de mieux voir :

— Une poule au gruau ! s’écria-t-elle toute surprise.

— C’est le collecteur qui me l’a donnée, reprit Jehan, pour lui avoir enseigné à rédiger ses comptes en latin.

— À la bonne heure, dit Catherine en riant ; à force de prendre à ceux qui entrent à la ville une poignée de farine, une poignée de sel ou une poignée de pruneaux, maître Jacques est devenu le plus riche bourgeois du pays et peut payer les leçons qu’on lui donne aussi cher qu’un seigneur ; mais le père sait-il ce qu’on lui prépare ?

— Il dormait quand je suis revenu.

— Alors disposons tout avant son réveil : j’ai encore là des noix et des cerises, ce sera pour son dessert.

En parlant ainsi, Catherine vidait sur la table son panier d’osier. Jehan ouvrit une armoire d’où il tira des écuelles, des plats, des cuillères, des gobelets de bois, et tous deux se mirent à dresser le couvert.