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au bord du lac.

qu’ils avaient connus, les lieux où ils avaient été heureux ! Arvins retrouvait l’accent, le geste, la poésie et les croyances auxquels son enfance avait été accoutumée ; il n’était plus à Rome, plus esclave, c’était l’enfant du grand chef Menru, assis au foyer de sa mère, et apprenant d’elle les traditions de son peuple.

La nuit arriva sans que Norva ni son fils s’en aperçussent. Les yeux levés vers ce bleu ciel d’Italie tout parsemé de brillantes étoiles, ils continuèrent à s’entretenir de la patrie absente sans prendre garde à la fuite des heures. Arvins confia à sa mère son espoir d’affranchissement.

— Morgan nous parle aussi de délivrance, dit Norva ; mais c’est avec du fer, non avec de l’or qu’il compte l’obtenir.

— Songerait-on à une révolte ? demanda vivement Arvins.

— Je le crains, répondit Norva. Morgan entretient des intelligences avec des esclaves de notre nation. La plupart ont employé leur pécule à acheter secrètement des armes, et, à la première occasion, ils peuvent jeter le cri de guerre. Les Daces et les Germains complotent aussi mystérieusement, et j’entends rappeler sans cesse, tout bas, le nom de Spartacus.

Les yeux d’Arvins s’allumèrent : Norva s’en aperçut, et, saisissant avec une tendresse inquiète la main de l’enfant :

— Rappelle-toi que tu es trop jeune pour te mêler à une pareille entreprise, dit elle.