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le chevrier de lorraine.

geait vers le cellier, plusieurs coups furent frappés à la porte d’entrée, et on l’appela par son nom.

— Dieu nous sauve, c’est Nicolle ! s’écria-t-elle.

— Oui, femme, reprit la voix ; ouvre vite par le ciel ! je meurs de soif et de faim.

Elle courut ouvrir, et un homme au teint bruni, mais à l’air jovial, parut sur le seuil. Il était vêtu de la robe de pèlerin, et portait, suspendue au cou, une de ces petites boîtes grillées dans lesquelles on renfermait les reliques à vendre.

— Jésus Dieu ! est-ce bien vous ? reprit la femme stupéfaite.

— Tu ne m’attendais pas sitôt, dit le nouveau-venu ; mais depuis que Jeanne la Pucelle met partout les Anglais en fuite, ceux-ci sont devenus dévots ; dès qu’ils m’apercevaient avec ma robe de pèlerin, ils accouraient pour acheter des reliques qui pussent les préserver de malencontre : aussi, ai-je tout vendu en quelques jours, et je viens renouveler ma trousse à miracles…

— Plus bas ! malheureux ! interrompit la femme effrayée ; il y a là un jeune garçon et un moine.

— Ah ! goddem !

— Au nom de Dieu ! ôtez vite cette robe…

— C’est inutile, dit le Père Cyrille, qui avait tout entendu de la pièce voisine, et qui se montra, l’air sévère et courroucé.

La femme recula en poussant un cri. Quant au pèlerin, après le premier mouvement de surprise, il parut prendre son parti.