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au bord du lac.

Quant à celui qu’ils poursuivaient, il s’arrêta couvert de sueur, de poussière et de sang, au milieu des gens qui venaient de le délivrer si à propos. C’était un jeune garçon d’environ quinze ans, fort et leste, dont le visage exprimait la résolution ; mais plus pauvrement vêtu que les plus pauvres chevriers de la vallée.

— Par le ciel ! qu’avaient donc ces damnés malandrins à te poursuivre ? lui demanda un des paysans qui avaient tenu ferme au moment de la panique générale.

— Ils voulaient me faire crier : — Vive le duc Philippe, le roi anglais ! répondit le jeune gars.

— Et tu n’as pas voulu ?

— J’ai répondu : — Vive le roi Charles VII, notre gentil prince et légitime maître !

Une rumeur d’approbation se fit entendre dans tous les rangs.

— C’était parler bravement, reprit le paysan, et je loue Dieu que nous ayons pu te débarrasser de cette truandaille ; c’est une honte pour ceux de Domremy que les chiens bourguignons de Marcey puissent mordre tous les vrais Français qui viennent à nous : un jour ou l’autre, il faudra en finir, en mettant le feu à leur chenil.

Quelques voix appuyèrent ces paroles, tandis que d’autres plus sages engageaient à la patience : chacun reprit la route de Domremy, et le jeune garçon, occupé à étancher le sang qui coulait d’une légère bles-