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le serf.

— Que veux-tu dire ?

— Voici une cédule prouvant que j’ai habité un an et un jour à Besançon.

— À Besançon, répéta maître Moreau en saisissant le parchemin que tendait Jehan.

— Et que m’importe ! répliqua Raoul.

— Monseigneur n’ignore point, sans doute, que le séjour dans certaines villes affranchit.

— Est-ce vrai ?

— Trop vrai, murmura maître Moreau.

— Ainsi, ce drôle est libre sans mon consentement ?

— Libre de servage, fit observer l’intendant ; mais il n’en demeure pas moins le vassal de monseigneur, tenu à l’hommage et obligé de le servir envers et contre tous, sauf contre le roi.

— Et c’est à quoi je suis prêt, répondit Jehan.

— Au diable le manant ! s’écria Raoul en frappant du pied. Qui a permis que le séjour d’une ville pût ainsi prescrire contre nos droits ? Vive Dieu ! ces communautés de bourgeois finiront par devenir des lieux d’asile pour tous nos hommes.

Puis se tournant vers Jehan.

— Et tu viens ici sans doute pour me braver, drôle ? ajouta-t-il.

— Loin de moi cette pensée, monseigneur, dit le jeune homme.

— Que cherches-tu alors ?

— Monseigneur a sur ses domaines un vieillard et une jeune fille, tous deux en servage ; le vieillard