Page:Souvestre - Au bord du lac, 1852.djvu/118

Cette page a été validée par deux contributeurs.
105
le serf.

Ils arrivèrent bientôt devant les ennemis, qui les avaient aperçus et s’étaient préparés à les bien recevoir. Les archers anglais s’avancèrent d’abord contre le corps des bourgeois, qui marchait un peu en avant ; mais, contre toute attente, ceux-ci tinrent bon, et, bien qu’il en tombât un grand nombre, ils continuèrent à s’approcher du camp.

Les gens d’armes, voyant cela, ne voulurent point se montrer moins hardis, et chargèrent à bride avalée sur l’ennemi ; mais, soit qu’ils eussent mal calculé l’espace, soit qu’ils tinssent peu de compte des communes, comme à Poitiers, ils heurtèrent une partie de la troupe des bourgeois, qu’ils culbutèrent sur les archers. Il en résulta un désordre dont ceux-ci profitèrent, et qui fut encore augmenté par l’arrivée de la cavalerie anglaise.

Cependant, les gens d’armes, qui avaient évidemment compromis le succès par maladresse ou mauvais vouloir, s’efforçaient de racheter leur faute par la bravoure. Entraîné dans la mêlée, Jehan avait été renversé plusieurs fois et s’était toujours relevé plus acharné au combat. Il venait d’échapper à la flèche d’un archer, lorsqu’il se trouva en face d’un chevalier anglais qui leva son épée pour le frapper ; mais le jeune serf ne lui en laissa pas le temps, et lui enfonça sa hallebarde au défaut de la cuirasse : le chevalier tomba ; Jehan releva son épée, saisit la bride du cheval, sauta en selle et se précipita de nouveau au combat.