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côté et passait sa manche sur ses yeux ; finalement, comme il y a une fin à tout, Tam donna quittance de rien à son père et tuteur, et sortit de la hutte sans regarder derrière lui.

Tam-Kik avait été surnommé Tam-Kik par les petits garçons des villages voisins, parce qu’il allait par ci par là aux portes des métairies demander un petit morceau à manger, en disant :


Morceau de viande ou de pain,
Toujours charité fait du bien.


Faut vous dire que dans la pauvre maison de Job, Tammik n’avait jamais senti l’odeur du lard, ni frais ni salé, car le pauvre vieux journalier, n’ayant ni sou ni rentes, vivait principalement de la charité des seigneurs de Lothéa. Au surplus, quand il avait son écuellée de soupe de pain noir, Job ne désirait rien de personne ; plus raisonnable en cela que bien des gens qui se font maigrir, en vérité, à force de vouloir s’engraisser avec le bien du prochain ; plus raisonnable aussi que Monsieur Tammik, son digne fils, qui disait, en regardant ses maigres jambes, qu’un peu de lard le dimanche ne lui ferait pas de mal aux dents. C’était, du reste, le seul défaut, la seule ambition de Monsieur Tam, et encore doit-on l’excuser, puisqu’il désirait ces douceurs pour son vieux père plus que pour lui.