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sophie kovalewsky.

été témoignent d’un profond découragement. Elle écrit :

« Ma sœur continue à être dans le même état que cet hiver. Elle souffre beaucoup, a l’air très malade, et n’a pas la force de bouger ; je commence à craindre qu’il n’y ait plus d’espoir de guérison. Elle est extrêmement contente que je sois venue, et me dit sans cesse qu’elle serait certainement morte si j’avais refusé de venir maintenant. Je suis si démontée aujourd’hui que je ne veux plus écrire. La seule chose qui m’amuse par la pensée est notre féerie, et Væ Victis. »

Elle fait allusion à deux projets de travail en commun commencés au printemps. La féerie était de moi, et devait s’intituler : Quand la mort ne sera plus. Sophie, lorsque je lui communiquai mon plan, s’y attacha avec tant d’ardeur, et continua si vivement à le développer dans son imagination, qu’elle en a sa part de collaboration. Væ Victis lui appartenait à elle seule et devait être un long roman ; l’idée et le plan étaient très originaux ; mais elle ne se croyait pas encore capable d’écrire seule.

Dans une de ses lettres suivantes elle dit : « Tu as la bonté d’assurer que je signifie quelque chose dans ta vie ; et cependant tu possèdes plus que moi, tu es incomparablement plus riche ; songe à ce que tu dois être pour moi, qui sans toi serais si isolée, si pauvre d’affection et d’amitié ! »

Et plus tard :

« As-tu jamais remarqué qu’il y a des moments où