Page:Souvenirs d'enfance de Sophie Kovalewsky.djvu/24

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
7
premiers souvenirs.

Cependant, tout en murmurant, Niania sent qu’il faut se mettre à la besogne ; et si les préliminaires ont été longs, la toilette elle-même s’accomplit rapidement. Niania nous passe une serviette mouillée sur la figure et les mains, donne deux ou trois coups de brosse à nos crinières ébouriffées, nous met nos petites robes auxquelles il manque facilement quelques boutons, et nous voilà prêtes.

Ma sœur se rend chez sa gouvernante pour prendre sa leçon : mon frère et moi restons dans notre chambre. Niania, que notre présence ne gêne nullement, soulève des nuages de poussière en balayant le plancher ; elle couvre nos petits lits de leurs couvertures, secoue ses propres édredons, et la chambre des enfants passe pour faite.

Mon frère et moi jouons avec nos joujoux, assis sur un divan de toile cirée, dont le crin s’échappe par poignées. Rarement on nous fait promener et seulement lorsque le temps est beau, ou bien encore les jours de grande fête, quand Niania nous conduit à l’église.

Sa leçon terminée, ma sœur revient en courant ; sa gouvernante l’ennuie, elle s’amuse davantage chez nous, d’autant plus que Niania reçoit des visites — des bonnes d’enfants ou des femmes de chambre, auxquelles on offre du café, et qui racontent beaucoup de choses intéressantes.

Quelquefois maman entre un instant dans notre chambre. Mes souvenirs de cette époque me la montrent toujours toute jeune et très jolie. Je la vois