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À LA COUR DE GASTON PHŒBUS.

a autant et plus à battre en lui qu’en moi. Pourquoi, dit le comte, qui tantôt entra en soupçon ? — Par ma foi, Monseigneur, depuis qu’il est rentré de Navarre, il porte à sa poitrine une boursette toute pleine de poudre ; mais je ne sais à quoi elle sert ni ce que il en veut faire ; seulement il m’a dit, une fois, ou deux, que Madame sa mère sera bien bref (bientôt) mieux en votre grâce que onques ne fut. — Ho ! dit le comte, tais-toi, et garde-toi bien que tu ne te descouvres à nul homme au monde de ce que tu m’as dit. — Monseigneur, dit l’enfès, volontiers.

» Le comte de Foix entra lors en grande imagination, et se couvrit (ne dit mot) jusqu’à l’heure du dîner, et s’assit comme les autres jours en sa salle. — Gaston, son fils, avait usage de lui servir tous ses mets, et faisait essai de ses viandes. Sitôt qu’il eut mis devant le comte le premier mets, le comte regarde et voit les pendants de la boursette à la cote de son fils ; le sang lui mua (son sang remua) et il dit : Gaston, viens, je veuil parler à toi en l’oreille. — L’enfant s’avança de la table ; le comte ouvrit lors son sein (celui de Gaston) et desnoua la cote, et prit un coutel (couteau) et coupa les pendants de la boursette, et elle lui demeura en la main, et puis dit à son fils : Quelle chose est en cette boursette ? L’enfès, qui fut tout surpris et ébahi, ne sonna mot, mais devint tremblant