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SENSATION ET PENSÉE

(PARMÉNIDE, EMPÉDOCLE, PLATON). La matière peut sentir et penser dans les organismes comme elle vitet se meut en nous et dans le reste du monde. Telle était l’antique conception moniste et hylozoïste de l’univers. 11 n’y a pas jusqu’à ANAXAGORE, dont la théorie de la connaissance semble pourtant partir de principes opposés, qui ne soit strictement naturaliste. ANaxA-GORE a bien vu que la sensation consiste dans une modification qualitative, une altération, une affection du sujet (ThéoPxr., De Sensu, v, 27). C’est encore, selon nous, une idée profonde, et qui apparaîtra vraie quelque jour, que « toute sensation est liée à une certaine souffrance » (Jbid., 17, 29), conception qui s’accorde d’ailleurs avec l’hypothèse fondamentale d’ANAXAGORE sur les conditions de la sensation, laquelle résulte de la « contrariété » du sujet et de l’objet. Avec HÉRACLITE il enseignait que la sensation n’était pas produite par le semblable, mais par le contraire. Notre peau n’est affectée par un corps chaud, par exemple, que si la température de ce corps diffère de celle de la peau. L’acuité de la sensation dépend aussi, selon ce philosophe, du volume de l’organe et de la grandeur de l’organisme vivant ; en tout cas, la sensation est en rapport avec la forme et le développement de l’organe.

Pour les vieux penseurs de l’lonie que nous devons, avec ARISTOTE, appeler des physiciens et des physiologues, le corps de l’homme vivant sent et pense, et penser et sentir étaient pour eux la même chose (1). Mais les conditions de la pensée sont bien, au fond, celles de la sensation :

elles résultent toujours, en dernière analyse, de l’unité de substance 

existant entre le milieu externe, c’est-à-dire le monde, constitué d’un ou de plusieurs éléments, et le milieu interne, c’est-à-dire l’organisme, formé du même ou des mêmes éléments. Ce qui est dit de la vie et de la sensibilité d’une plante ou d’un animal, on le disait du reste de la nature. Quand, pour s’expliquer la puissance attractive de la pierre d’ai-mant, THaLës de Milet lui attribuait une éme, cela revenait à dire qu’il considérait l’aimant comme un être animé(2). Aucun de ces Hellènes n’a fait dériver l’être de la pensée, comme quelques modernes ; la pensée n’était, pour eux, qu’un mode de l’existence. Tout sort, à la manière d’un éternel devenir, de la matière des choses, considérée comme animée ct éternellement en mouvement.L’Intelligence même d’ANaxaGorE, philosophe auquel SOCRATE, PLATON οἱ ARISTOTE ont amèrement reproché le piètre rôle qu’il lui prête dans le drame de l’univers, car il ne lui avait guère attribué (4) Anisrore, De an., II, nr. Où ÿe doyato : rÔ poovetv καὶ τὸ αἰσθάνεσθαι ταὐτὸν εἶναι φασιν. ArisToTE ajoute ici que « {ous ont cru que la pensée était corporelle comme la sensation ». Tlivtes γὰρ οὗτοι τὸ νοεῖν σωματικὀν ὥσπερ τὸ αἰσθάνεσθαι ὑπολαμδάνουσιν.

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(2) De an,, 1, 11, 14, τὸν λίθον ἔφη φυ (ἣν ἔχειν, ὅτι τὸν σ́δηςον κινεῖ. J. Soury. — Le système nerveur central.

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