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ALCMÉON

car les canaux, par lesquels ont lieu les sensations, sont interceptés[1]. » Parmi les causes des maladies, les unes sont rapportées, par Alcméon, à un excès de chaleur ou de sécheresse, les autres à une surabondance ou à une insuffisance de nourriture, d’autres enfin à quelques affections des parties du corps, telles que le sang, la moelle épinière et le cerveau (αἷμα ἣ μυελὸν ἣ ἐγκέφαλον). Tantôt les maladies doivent être attribuées à des causes extérieures, à la qualité des eaux (ὕδάτον ποιῶν), à celle des lieux, à la fatigue, etc.[2]. La santé lui paraissait dépendre de l’égale composition ou de l’équilibre des principes opposés suivants : de l’humide, du sec ; du froid, du chaud ; de l’amer, du doux ; dès que l’un de ces éléments prédomine sur les autres, la maladie se produit[3].

La théorie du sommeil et de la mort d’Alcméon, une des plus anciennes sans doute, est encore aujourd’hui, sous la forme de l’anémie cérébrale, la plus répandue : « Le sommeil arrive par la retraite du sang dans les veines, le réveil par sa diffusion ; si le sang demeure tout à fait retiré dans les veines, c’est la mort[4]. » « Les hommes meurent, a dit encore Alcméon, parce qu’ils ne peuvent pas joindre le commencement et la fin[5]. »

Nous ne considérons ici, dans Alcméon, que le biologiste, c’est-à-dire l’anatomiste et le physiologiste, non le physicien ni l’astronome[6]. Du philosophe — et, jusqu’à Galien, dans l’antiquité, quel biologiste, si l’on excepte peut-être quelques anatomistes et physiologistes de l’École d’Alexandrie, ne fut pas philosophe ? — nous ne rappellerons que ce qu’il est nécessaire de savoir pour comprendre le psychologue, dont Alcméon avait également l’étoffe. Pour Alcméon, comme pour les Pythagoriciens, les principes des choses étaient constitués par des contraires, tels que le doux et l’amer, le noir et le blanc, le grand et le petit, etc. Ce qu’Aristote a cru pouvoir retenir de ces systèmes, c’est que les contraires y formaient en effet les principes des choses, c’est-à-dire de l’univers éternel, τἀναντία ἀρχαὶ τῶν ὄντων[7]. C’est ainsi que les éléments, l’eau, l’air, le feu, étaient pour les physiologues ioniens, Thalès, Anaximène, Héraclite, etc., les

  1. Τhéophraste, De sensu, 26. Διὸ καὶ πηροῦσθαι, κινουμένου καὶ μεταλλάττοντος τὴν χώραν𐄁 ἐπιλαμθάνεσθαι γὰρ τοὺς πόρους δι’ ὧν αἱ αἰσθήσεις.
  2. Fragm. 1
  3. Fragm. 2.
  4. Placita, V, 23, 1. ̓Ἀλκμαίων ἀναχώρησει τοῦ αἵματος εἷς τὰς ὀμοῤῥους φλέϐας ὕπνον γίνεσθαί φησι𐄁 τὴν δ̓ ἐξέγερσιν, διάχυσιν𐄁 τὴν δὲ παντελῆ ἀναχώρησιν, θάνατον.
  5. Aristote, Probl., ΧVΙΙ, 3. τοὺς γὰρ ἀνθρώπους φησὶν Ἀλκμαίων διὰ τοῦτο ἀπόλλυσθαι, ὅτι οὐ δύνανται τὴν ἀρχῆν τῷ τέλει προσάψαι.
  6. Comme les Ioniens, Alcméon tenait pour plane la surface du soleil et de la lune et leur attribuait une forme de nacelle ; il expliquait par un retournement du disque lunaire les éclipses de lune. Stob., Ecl. phys., 1, 526, 558.
  7. Aristote, Met., I, v.