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THÉORIE DES HALLUCINATIONS

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sensation, mais des images, que lui vient le mouvement. Voici un exemple qui fait bien comprendre la pensée d’ARISTOTE : « Quand, sentant que le flambeau est en feu, l’âme voit, par le sens qui est commun, que le flambeau est en mouvement, elle comprend qu’il y a danger. » Ainsi : 1° l’âme sent d’abord, par un sens spécial, ici par la sensibilité tactile, que le flambeau est en feu ; 2° le sens commun, réunissant toutes les perceptions des sens spéciaux, véritable sensorium commune, évoque l’image motrice du flambeau ; l’âme comprend, grâce à cette image du sensorium commune (rÿ x yropie) qu’il y a danger, et, 3° le mouvement ou réflexe de protection conscient s’exécute.

La sensibilité et l’imagination ne sont d’ailleurs point la même chose. Si la sensibilité (xtcônas) et l’imagination (oxvtxsia) étaient la même chose, celle-ci appartiendrait à tous les animaux : c’est ce quine paraît pas exister ; témoins les fourmis, les abeilles, les vers ; ces êtres n’ont pas d’imagination. En outre, les sensations sont toujours vraies (ἀληθεῖς. αἰεὶ [αἰσθή- σεις]), tandis que les images sont pour la plupart trompeuses : ai dt φαντασίαι γένουται αἱ πλείους ψευδεῖς (1).

Mal voir, mal entendre, πο peut pourtant appartenir, dit ARISTOTE, qu’à un être qui voit et qui entend quelque chose de vrai, bien que ce quelque chose ne soit pas ce qu’il croit (2). C’est la meilleure définition de l’hallucination que nous connaissions. L’hallucination est vraie, en effet, et elle ne peut pas ne pas l’être, pour celui qui la voit ou l’entend ; et pourtant ce qu’il voit ou entend n’est pas ce qu’il croit exister. On admirera la concision et la profondeur de cet aphorisme. Impossible de renfermer plus de choses en moins de mots. Dans le passage suivant, AristoTE décrit avec la même exactitude certaines illusions de la mémoire qui, sous le nom de paramnésies, ont été étudiées de divers côtés dans ces derniers temps : « Parfois il nous arrive de penser et de nous souvenir que nous avons déjà antérieurement entendu et vu quelque chose ; et cette illusion a lieu lorsque, contemplant la chose elle-même, on se méprend et on la considère comme si elle était l’image d’une autre chose. « Parfois, c’est le contraire qui a lieu, comme il arriva à ANTIPHÉRON d’Orée et à d’autres qui déliraient : ils parlaient de leurs imaginations (ox- τάσματα) comme d’événements arrivés et comme s’ils s’en fussent souvenus. Et c’est ce qui a lieu lorsqu’on considère comme une image d’une chose, ce qui n’en est pas du tout une image (3) ». (x) De απ., ΠΠ, nr, 5. Cf. pourtan L 111, 1).

(2) De insomn., ο. 1. τὸ γὰρ παρορᾶν χαὶ παραχούειν ὁρῶντος ἀληθές τι καὶ ἀχούοντος, οὐ μέντοι τοῦτο ὃ οἵεται.

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(3) 36 πιθπι. ρέ γεηιἰπίσαο. ο. 1. τοῦτο δὲ γίνεται, ὅταν τις τὴν μὴ εἰκύνα ὡς εἰκόνα θεωρῇ.