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LA FONTAINE.

laine coupe ainsi la plus grande partie de ses vers décasyllabes’, je ferai remarquer que le poète place (|uelquefois cette césure unique autre part qu’à sa place légale ^.

Sa face | était de pleurs toute baignée. (I, 364, 39.)

D’autres fois, outre la césure du quatrième pied, La Fontaine en imagine d’autres.

4 — 3 — 3

Les vents me sont | moins qu’à vous 1 redoutables. (I, 127, 20.)

4 — 4 — 2

Mit en dépôt | un cent de fer | un jour. (II, 3.^.ï, 46.)

Ou encore cette première partie est divisée elle-même :

2 — 2 — 6

Ami, | dit-il, | je sais que tu me quittes, (11, 304, 28.)

1 — 3 — 6

Qui, | maudissant | sa curiosité. (Il, 363, 57.)

Enfin certaines coupes sont plus irrégulières encore, comme celle ci :

2 — 5 — 3

Un loup | n’avait que les os | et la peau. (1, 70, i.)

Ces exceptions, rares en somme dans le décasyllabe, sont, au contraire, assez nombreuses pour former une partie de la règle dans le vers de huit pieds. La Fontaine semble s’être travaillé à modifier à l’infini la règle si étroite de Malherbe qui, là encore, propose de couper le vers en deux hémistiches. On voit d’ici la monotonie d’un pareil ron-ron, si j’ose m’exprimer ainsi. Rien n’égale au contraire l’admirable variété des coupes que La Fontaine a eu le talent d’introduire dans ce vers si court, partant réfractaire, pour un observateur superficiel, aux combinaisons harmonieuses. Par l’heureux emploi qu’il en a su tirer, notre poète a fait de l’octosyllabe son vers par excellence ^ On est surpris en effet de constater que l’ingénio-

. Exemple vingt-quatre vers de suite, ainsi coupés, au tome I, p. 115, 116, et cinquante-trois semblables, à la file, au tome III, p. 273-3"9. . La Fontaine revenait ainsi plus ou moins consciemment aux libertés de lancienne prosodie. — Cf. Gaston Paris, Étude sur le rôle de l’accent latin dans la lanr/ue française. 1862. p. 112, 113. . Cf. de Gramont, p. 120.