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HISTOIRE DU PARNASSE

paillettes d’or qui s’y trouvent peut-être. Au Parnasse ils sont offusqués par de redoutables voisins, comme Rollinat.

L’étrange artiste déclame et chante ses vers aux mercredis de Mario Proth, dans les brasseries littéraires, aux Hydropathes[1]. Il est présenté, en 1875, par Anatole France chez Leconte de Lisle ; il dit La Dame en Cire, et obtient un succès d’horreur macabre[2]. Il propose au Comité du Parnasse l’histoire d’une de ses maîtresses qui meurt mangée par sa chevelure noire[3]. France conseille de l’accepter, sans enthousiasme : « Oui, c’est *un Mallarmé possible. Mais ne mettre qu’une pièce ».

Passons à côté de L. Salles, et même de Louisa Siefert, quoiqu’on lui ait accordé la moitié d’une feuille. Huit pages, pleines de ces choses ordinaires qu’on a vues partout ! Et Catulle Mendès la compare à « la grande Marceline[4] » ! Les Lyonnais l’admirent fort, en bons compatriotes, comme aussi Josephin Soulary. On est d’abord un peu surpris de voir surgir au Parnasse ce romantique ; mais c’est un bon sonnettiste qui, pour se faire accepter des Parnassiens, a un titre : il imite Baudelaire dans La Succube[5].

Talmeyr retarde sur Soulary, car il en est encore à Béranger, avec la Lettre Posthume de sa maltresse ; elle lui dit son amour persistant, et ses regrets :


Je suis chérubin, tu me vis grisette.
Pour ces péchés-là Dieu n’est jamais dur…


Ce n’est même plus le Dieu des bonnes gens, c’est le Dieu des amants, vieille guitare romantique. Heureusement nous arrivons à Theuriet, et nous voudrions pouvoir en parler longtemps, car son envoi, c’est le coin vert, c’est l’oasis du Parnasse. Il aurait pu devenir une des gloires de l’École, ajouter à son influence, si l’on avait fait meilleur accueil à ce poète admirablement doué par Dieu, bien servi par son existence en pleine nature, formé par des études profondes et viriles, car c’est à l’âge d’homme qu’il apprend à fond l’allemand, l’anglais, le grec… et le français : élève de La Fontaine

  1. Talmeyr, Correspondant du 25 octobre 1927, p. 265-266 ; Goudeau, Dix Ans, p. 77 sqq., 175-176.
  2. Mme Demont-Breton, II, 143.
  3. Dans les Brandes, p. 76. Cf. Bersaucourt, Au temps des Parnassiens, p. 88 sqq ; Mendès, Dictionnaire, p. 256.
  4. Rapport, p. 146-147.
  5. Mendès, Dictionnaire, p. 276-277 ; Th. Gautier, Rapport, p. 345 sqq. Huysmans l’appréciait fort ; cf. Revue, 1927, p. 471.