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DU DRAME ROMANTIQUE

moins forte que Pauline, Adèle sent bien que revoir Antony, c’est s’abandonner, vaincue d’avance, à la passion ; et, tandis que Pauline calme, à force de raison. Sévère, Adèle se laisse entraîner par la passion d’Antony jusqu’à s’écrier : « Antony ! mon Antony, oui, je t’aime’! »

Désormais elle a beau le quitter, le fuir même : elle est perdue. Désormais aussi tout rapprochement entre les deux pièces est impossible : Adèle a succombé à la violence ; le mauvais ange du début devient un dieu, à qui elle sacrifie tout. Elle est insultée publiquement à cause d’Antony, et ne l’en rend pas responsable ~. Elle se voit, entrant dans un bal les yeux rougis… « Ils diront : Ah ! elle a pleuré… mais il la consolera, lui : c’est sa maîtresse ^. » Et elle se console en effet aussitôt dans les bras de son amant ^. Le souvenir de sa fille peut l’empêcher de fuir avec Antony, mais non pas de mourir. Toute résistance, toute force de volonté est brisée en elle. Adèle est vaincue par l’amour ; l’amour coupable ne la relève pas, comme Ghimène, mais l’abat comme Camille.

Comme Kitty Bell, et plus encore qu’Adèle, Blanche s’oubhe, pour ne songer qu’à celui qu’elle aime : l’amour fait d’une simple enfant une héroïne qui reste femme : elle se dévoue en tremblant.

C’est d’abord une jeune fille, aimant son père et tâchant de remplacer sa mère auprès de lui ^, éprouvant

. Théâtre, t. II, p. 190. . P. 213. . P. 216. . P. 217. . Drame, t. II, p. 394-396.