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de fois elle fut contée par les poètes, cette histoire de magie et d’amour ! Les îles de Circé et de Calypso ; le séjour de Jason et des Argonautes à Lemnos chez Hypsipyle ou à Colchos chez Médée ; les épisodes de Thésée à Naxos près d’Ariane, d’Énée à Carthage près de Didon ; les jardins d’Alcine ou d’Armide ; les entrevues du Tannhaûser et de Vénus sur les sommets du Hartz sont autant de reproductions, idéalisées par l’art, de ce canevas primitif au dessin incorrect et aux naïves couleurs. En outre, sous ces ornements bizarres et sous ces formes surnaturelles, il n’est pas malaisé de retrouver les traces d’une légende semi-historique sur quelques femmes des tribus sauvages et cannibales, qui se seraient enflammées pour des chefs aryens majestueux et intrépides. De ces unions inégales sera sortie une race mélangée, à la figure brunie, aux passions ardentes, et trahissant sa double origine par l’alliance de la valeur la plus brillante à la violence la plus brutale. En dépit des fables au moyen desquelles toutes leurs actions sont déguisées, les héros du Mahâbhârata sont des hommes supérieurs ; mais ce ne sont que des hommes.


IV


Accompagnés de leur mère, les cinq voyageurs continuent leurs courses de bois en bois ; ils s’arrêtent pieusement dans les ermitages, où les anachorètes et les brahmanes les reçoivent avec honneur. En revanche, ils les affranchissent par leur bravoure des attaques de plusieurs râkchâsas ; c’est ainsi que, non loin de la cité d’Ekatchakra, Bhîmaséna aux grands bras et au ventre de loup extermine l’anthropophage Vaka. Cependant leur exil est interrompu par une importante nouvelle, celle d’un swayambara : on appelait de ce nom la cérémonie par laquelle, à la suite de maintes épreu-