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comme une vaste collection, où l’on recueillit, où l’on entassa tous les mythes et tous les récits, qui offraient entre eux quelque filiation ou quelque analogie. On suppose que, dans les derniers siècles qui ont précédé notre ère, les Brâhmanes, ayant à lutter contre les progrès croissants des Bouddhistes, leurs rivaux, et contre les volumineux écrits que ceux-ci publiaient, s’empressèrent de réunir sans distinction en un seul ouvrage toutes les traditions qui les intéressaient et qui pouvaient leur servir au besoin.

Le savant indianiste prussien, M. Weber, qui s’attache continuellement, de crainte d’exagération, à diminuer l’ancienneté des productions de la littérature sanscrite (soit dans ses Indische Studien, soit dans son cours professé à l’Université de Berlin en 1852 et que M. Alfred Sadous a traduit en 1859), a indiqué que le premier témoignage direct, qui atteste la réalité d’une épopée sur le sujet du Mahâbhârata, se rencontre chez le rhéteur grec Dion Chrysostome, qui florissait sous les règnes de Vespasien et de Trajan. M. Weber prétend que cette connaissance devait être alors fort récente, ayant été rapportée par des navigateurs qui avaient visité les côtes méridionales de l’Inde ; et, comme Mégasthène, qui avait été envoyé en ambassade dans ce pays par le roi de Syrie, Séleucus Nicalor, et dont les renseignements nous ont été transmis par Arrien, n’a fait aucune allusion à cette épopée, il en conclut un peu vite que probablement elle avait été élaborée depuis l’époque de Mégasthène jusqu’à celle de Dion Chrysostome. Un deuxième témoignage, constatant son existence, ne se retrouve que dans les Dionysiaques de Nonnus de Panopolis, qui remontent, tout au plus, au Ve siècle après Jésus-Christ. Ce qui engage également M. Weber à lui refuser une date trop reculée, c’est que les faits et les personnages qui y figurent ne sont pas ou ne sont guère mentionnés dans les Brâhmanas véritablement anciens ; c’est qu’au contraire il y est question des peuples occidentaux, des Sakas (Saces), des Pahlavas (Pelhvis ou Perses) et des Yavanas (fils de Javan