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qui habite le ciel : éternel, irrésistible, incomparable, plein de force et d’équité, roi du monde, il a droit à l’adoration universelle. Le Zeus homérique lui ressemble, mais en petit ; il est bien plus humain. Indra fait songer beaucoup plutôt au Jéhovah biblique, et d’autant plus qu’il est le seul grand dieu ou du moins le principal dieu de l’Inde antique ; les autres Dévas ne sont guère auprès de lui que des génies subalternes, des divinités secondaires. Relisez, d’une part, le cantique de Moïse, celui d’Anne, mère de Samuel, les Psaumes, le Livre de Job, les Prophètes ; de l’autre, lisez ces hymnes, signés des noms semi-fabuleux de Renou, Pragâtha, Viçwâmitra, Vâmadéva, Gotama, Pâroutchhépa, Garga, Hiranyastoûpa, Bharadwadja, Nodhas, etc. : vous serez frappés de la ressemblance qui existe entre ces inspirations de deux peuples, si différents d’ailleurs. Depuis les temps les plus reculés, les pasteurs aryens reconnaissaient Indra comme le Dieu suprême : chaque père de famille, prêtre dans sa maison, transmettait à ses enfants, comme un pieux héritage, le culte d’Indra, les chants destinés à célébrer sa gloire. Le Rig-Véda est plein de ces chants, dont plusieurs sont terminés par des refrains et offrent la diction la plus noble et la plus élevée. Celui qui suit passe pour être du rishi Gritsamada :

Le dieu qui naquit le premier, celui qui, justement honoré, a embelli les autres dieux par ses œuvres, celui dont la force et la grandeur infinies font trembler le ciel et la terre, ce dieu-là, peuples, c’est Indra ! Le dieu qui a consolidé la terre ébranlée, qui a déchiré les nuages orageux, qui a agrandi la plaine des airs, qui a raffermi les cieux, ce dieu-là, peuples, c’est Indra ! Le dieu par qui vivent tous les êtres, qui a refoulé ses lâches adversaires dans des grottes ténébreuses, qui s’empare de leurs dépouilles comme un chasseur de sa proie, ce dieu-là, peuples, c’est Indra ! Le dieu que sollicite la prière du riche ou du pauvre, à qui s’adressent le prêtre dans ses invocations et le poète dans ses chants, ce dieu à la face sublime qui accepte nos dons, ce dieu-là, peuples, c’est Indra ! Le dieu à qui appartiennent les coursiers, les campagnes fertiles, les génisses, les villes, les chars remplis de richesses,