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vant celui des Védas. C’est là qu’on saisit la filiation d’un certain nombre de fables de la Perse, de la Grèce et de l’Italie, des peuples celtes, teutons et slaves ; c’est là que le Brâhmanisme a pris les éléments de ses systèmes religieux ; c’est de là qu’est dérivé par altération ce Bouddhisme, qui a envahi l’île de Ceylan, la Chine, le Tibet, la Tartarie, plus de la moitié de l’Asie, et dont les sectateurs sont actuellement au nombre de plus de trois cents millions ; c’est de là enfin, on peut le dire, qu’est sortie toute la poésie de l’Inde.

L’authenticité des quatre Védas est incontestable, et Colebrooke, par toute une série d’arguments, aussi solides qu’ingénieux, a réfuté les sophismes de Pinkerton, qui prétendait qu’ils avaient été forgés par les Brahmes dans des temps assez modernes ; mais si leur antiquité est certaine, l’époque précise de leur composition est restée douteuse. Les Indiens n’ont jamais eu de chronologie, et l’érudition moderne est fort en peine pour combler cette lacune. Se fondant sur des Yotischs ou calendriers sacrés, annexés aux Védas, et qui marquaient le moment des différentes cérémonies par l’apparition de certains astres, Colebrooke s’est efforcé de prouver que la position des constellations, indiquée par ces calendriers, devait être reportée jusqu’au XIVe siècle avant J.-C. et que, par conséquent, la rédaction des Védas eux-mêmes était encore plus ancienne. En outre, s’apercevant que l’hymne à Pourousha (à l’Homme), un des plus beaux et des plus curieux du Rig, est écrit dans le style des poëmes épiques, il en conclut que, lors de la compilation des Védas (pour ne pas remonter plus loin), le sanscrit, de rude et d’irrégulier qu’il était d’abord, avait eu déjà le temps de devenir élégant et correct. William Jones, de son côté, arguant de la différence de langage qui existe entre les poésies védiques et les lois de Manou, et ajoutant une foi exagérée aux listes des rishis ou chantres, citées dans quelques Oupanischads, n’a pas craint de placer positivement la rédaction de l’Yadjour 1580 ans avant l’ère chrétienne.