142 ÉTUDES SUR LA LITTÉRATURE SANSCRITE.
chats naissent des chiennes et les rats des ichneumons. Les aliments sont souillés par des milliers de mouches ; le soleil s'avance au rebours de sa marche ordinaire ; les étoiles s'éclip- sent l'une après l'autre. Tant de présages ne convertissent pas ces mécréants : ils méprisent les gourous, leurs direc- teurs spirituels, les brahmanes, les mânes des ancêtres, les dieux du ciel ; la femme trahit son mari, le mari délaisse sa femme, la corruption est à son comble.
Krishna reconnaît les fruits amers de l'imprécation de Gândhàri ; après avoir défendu aux citoyens, sous peine d'être empalés, de boire des liqueurs fortes, il leur prescrit un pè- lerinage de dévotion sur les bords de la mer. Mais c'est en- core là pour eux une occasion de désordres : ils campent en dehors de la ville avec leurs concubines. Les viandes exquises, les boissons spiritueuses, les parfums enivrants sont prodi- gués, et, au bruit tumultueux de cent trompettes, au milieu d'une troupe de danseurs et de mimes, commence un magni- fique festin, qui rappelle, pour les blasphèmes qu'on y pro- fère, celui de Balthazar, pour les luttes qui s'y produisent celui des Lapithes et des Centaures. Krishna le préside, à côté de ses frères Râma et Gada, de ses femmes Roukmini et Satyabama, de ses fils Pradyoumna et Tcharoudeshna, de son petit-fils Anirouddha; Kritavarman, le hardi défenseur des Couràvas, Youyoudhana, vingt autres chefs sont assis à sa table. On discute, on dispute ; le vin enfante la colère, la colère s'exhale en injures, les Jnjures se paient par des coups. Kritavarman, Youyoudhana, Pradyoumna succombent ; le divin Krishna ne peut lui-même contenir sa fureur. Il ramasse une poignée d'herbes, qui, entre les mains de cet autre Samson, devient miraculeusement une lourde massue, frappe à droite et à gauche, et abat une multitude de victimes. La mêlée est générale; le massacre est horrible. Krishna, quia perdu ses parents les plus proches et ses amis les plus dé- voués, charge, parmi les survivants : les uns, de veiller sur les femmes, afin de les sauver de la convoitise et des outrages
�� �