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« Si vous vouliez prier aux bords des lacs dormants.
« Je dirais les splendeurs du soir et de l’aurore,
« Pour qu’il leur soit donné quelques larmes encore ;
« Pour que l’œuvre de Dieu n’entre pas au tombeau,
« Sans qu’on répète encor : L’univers était beau !!!
« Le voulez-vous, mon frère ? Hélas ! moi, je crois même
« Que le monde se meurt, parce que nul ne l’aime :
« Oui, nous n’avions pour lui qu’un cœur indifférent,
« Nous passions sans le voir et Dieu nous le reprend
« Pour toujours… Le soleil ne veut plus nous connaître,
« Le brin d’herbe attristé refuse de renaître ;
« Sur lui l’âme a jeté son deuil, et les méchants
« Ont de leurs pleurs amers terni les lys des champs.
« L’aile du papillon, aérienne voile
« Dont la poussière avait les reflets d’une étoile,
« Se fane avec la fleur et le chant des oiseaux,
« Et les doux nids s’en vont comme ont fait les berceaux !
« — Les berceaux où flottaient tant de chants éphémères,
« Promesses de bonheur qui trompaient tant de mères !
« Les berceaux qu’embaumait l’ombre du citronnier !
« Les berceaux !!… Si le tien n’était pas le dernier !!!
« Comme pour un parfum d’Orient un beau vase,
« On fit, ma Sémida, le ciel pour ton extase.
« Si tes cheveux sur moi venaient se dénouer,
« Me feraient-ils une âme à te la dévouer ? »
Elle s’enfuit…. Et moi, tout prêt à me soumettre,
Je commence à sentir que j’ai changé de maître ;
Et j’oublie, à sa voix, la nuit qui m’enfanta
Et les enseignements des rocs d’Éléphanta.