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Quelque temps après, le vicomte, rencontrant le financier, lui dit :

« — Eh bien ! veau d’or, êtes-vous content de la petite Olivia ?

« — Hum ! hum ! j’ai bien peur que la Béru ne se soit moquée de nous.

« — Et moi, je te le jure, dit le vicomte en tournant sur la pointe du pied et en flanquant son épée dans les jambes du financier, je te jure qu’Olivia se moque de toi. »


XXVIII

UN ELLÉVIOU.


Satan en était là de son récit, lorsque Luizzi entendit frapper à sa porte.

— Qui est là ? s’écria-t-il avec impatience.

— Monsieur, répondit Pierre, c’est M. Ganguernet avec M. le comte de Bridely.

Luizzi demeura quelque temps incertain, puis il répondit à travers la porte : « Priez-les d’attendre un moment. Je vais les recevoir. »

— Tu étais si pressé de savoir l’histoire de madame de Marignon ? lui dit Satan.

— C’est qu’il me semble, repartit Luizzi, que je la saurai encore mieux quand j’aurai causé un instant avec Ganguernet. Il y a certaine interruption à laquelle tu n’as pas répondu et que cet homme pourra peut-être m’expliquer. Cependant, ne t’éloigne pas.

En disant ces mots, Luizzi regarda le Diable. Son habit noir et son portefeuille avaient disparu. Il était vêtu d’une longue robe de soie avec des babouches, une seule mèche de cheveux pendait du sommet de sa tête, et il se curait les dents avec l’ongle de son petit doigt.

— Est-ce que tu vas au bal masqué ? lui dit le baron.

— Non, je vais en Chine, et je reviens à l’instant.

— En Chine ! s’écria Luizzi stupéfait, et qu’y vas-tu faire ?

— Arranger encore un mariage. Ne sommes-nous pas un vendredi ?

— Jour de malheur, dit Luizzi.

— C’est-à-dire jour de Vénus, repartit le Diable.

— Et quelle espèce de mariage vas-tu faire ?

— Je vais persuader à un mandarin d’épouser la fille de son ennemi mortel, afin de faire cesser des haines de fa-