Dans sept ou huit jours, le temps de faire faire des costumes de père au marquis. Nous l’emmenons ; il va boire avec Rigot et le charmer. La mère est censée malade… J’espère qu’en voilà une bonne farce !
— Très-drôle, en effet, dit Armand réfléchi.
Puis il reprit en voyant M. Ganguernet se lever :
— Comment ! vous me quittez déjà ?
— Il se fait tard, et je dois retrouver Gustave au restaurant pour aller ensuite voir les Deux Forçats à la Porte Saint-Martin. Le marquis nous a donné des billets.
— Si je n’étais malade, dit Luizzi, peut-être irais-je vous y retrouver. J’ai beaucoup entendu parler de cette pièce.
— On dit que c’est très-bien. Il s’agit d’un forçat qui, sachant le secret d’un autre de ses camarades, l’oblige…
— À lui donner sa fille en mariage, dit rapidement Luizzi.
— Non, puisque c’est le jour de ses noces. Ce n’est pas qu’on ne puisse faire une pièce avec ce que vous venez de me dire.
— Peut-être mieux qu’une pièce, repartit Luizzi toujours occupé de son idée de vengeance.
— Au fait, quand on a le secret de quelqu’un, on le fait passer par tous les chemins qu’on veut.
— Vous avez raison, s’écria Luizzi. Revenez me voir demain au matin.
— À demain donc.
— Excusez-moi, je vous prie, si je ne vais pas chez vous ; mais je ne sors qu’avec les plus grandes précautions.
Ganguernet se retira.
Et à peine Luizzi fut-il seul, qu’il agita la sonnette et que le Diable parut : il était en habit noir avec un énorme portefeuille sous le bras.
— D’où viens-tu ? lui dit Luizzi.
— Je viens de préparer un contrat de mariage dont peut-être un jour tu sauras le résultat.
— Est-ce le mien ?
— Je t’ai dit que je ne me mêlerais pas de cette affaire, si ce n’est pour te raconter ce que tu me demanderais.
— Tu sais sans doute pourquoi je t’ai appelé ?
— Je le sais, lui dit Satan, et t’approuve. Tu comprends enfin le monde, tu lui rends le mal pour le mal.
— Trêve de leçons ! dit Luizzi, je fais ce que je veux.
Le Diable sourit avec mépris.
— Esclave ! s’écria le baron.
Satan rit aux éclats. Le baron agita la sonnette. Le Diable se tut.
— Il me faut l’histoire de madame de Marignon.
— Tout de suite ?
— Tout de suite, et sans commentaires.
— Es-tu bien sûr de n’en pas faire ? Le monde est petit, mon maître,