Page:Sorr - Le vampire, 1852.djvu/99

Cette page a été validée par deux contributeurs.
95
le vampire.

toujours affaissé sur la table. Cette nuit, vous recevrez vos instructions.

Quand Robert se releva, sa physionomie était calme.

Pendant toute cette scène, le baronet n’avait pas eu une expression dans son visage qui se rattachât à ce qui se perpétrait sous ses yeux. Il buvait toujours imperturbablement. Les bouteilles qu’il avait vidées étaient sur une table voisine, disposées en jeu de quilles.

Horatio et de Rolleboise se levèrent. Leur compagnon, sérieusement occupé à voir grésiller un pouding dans les flammes bleuâtres du rhum, ne fit aucune attention à leur départ. En arrivant dans la rue, Robert s’apprêtait à partir seul, lorsque Horatio l’arrêta.

— Montez dans ma voiture.

Robert n’objecta pas une parole, et s’assit à côté de lord Mackinguss.

Horatio était le fils puiné du comte Mackinguss. À la mort de son père, son frère profitant du privilège accordé aux aînés de famille, prit possession de la fortune de ses ancêtres. Ce n’était pas un de ces maigres patrimoines comme il en existe en France, et dont on fait vanité. La fortune du vieux comte pouvait être de vingt à trente millions. Il l’avait reçue telle de son père et la remettait intacte à son fils. Certes, la nature en façonnant le caractère des deux frères, avait peu réfléchi aux différentes positions qui les attendaient dans le monde. Mais la nature n’a pas aussi les loisirs de la réflexion.

Edgard était avare et cupide ; Horatio, en toutes choses, se montrait grand seigneur. De toutes les carrières qui servent de refuge aux cadets de famille, il n’en voulut aucune. Aussi, à vingt ans, se trouva-t-il avec un des