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le vampire.

s’allument rougeâtres, les cheminées fument, des chevaux hennissent, des hommes chantent. Toutefois, est-il un fait certain, c’est que le lendemain ou le surlendemain de ces prétendues assemblées nocturnes, on a trouvé plusieurs fois aux Chutes de Stonebyres, un cadavre de femme inconnue au pays ; et plusieurs nuits après, la tombe qu’on leur accordait dans le cimetière du village était violée. D’ailleurs, le voyageur qui visite les ruines et les salles du manoir n’aperçoit rien, n’entend aucun bruit. Reste à savoir maintenant si ces meurtres… » — Je m’abstiens de traduire les réflexions du rédacteur. — Voyons, monsieur de Rolleboise, que pensez-vous de cela ? Croyez-vous aux vampires ?

— Mais, je présume que sir James, mieux que tout autre, pourrait éclaircir le fait, puisqu’il est le propriétaire du château des Chutes.

Sir James, retranché dans son flegme imperturbable, ne s’inquiéta pas plus des paroles du jeune homme, que si son nom n’eût pas été prononcé.

Robert avait vidé presque toute sa bouteille de stout, et cette pâle ivresse, sérieuse et grave, agissait sur lui. D’abord il s’était effrayé : la crainte l’avait saisi en se sentant pénétrer dans la vie mystérieuse et peut-être criminelle où il se voyait engagé. Mais, en ce moment, les choses comme les objets revêtaient une forme nouvelle. Il sentait son cerveau s’élargir, son esprit s’éclairer d’une lucidité étrange. La ronde figure de sir James lui apparaissait comme une fantaisie farcesque, une bouffonnerie d’Hogarth.

— Robert, fit Horatio, souvent les croyances superstitieuses ne sont que l’exagération de la vérité.