Page:Sorr - Le vampire, 1852.djvu/94

Cette page a été validée par deux contributeurs.
90
le vampire.

toute britannique nouée en cornes de limaçon, dirigeaient comme des défenses deux cols d’une forme des plus lancéolées. Ses sourcils en friche, son nez marisque et turbiné faisaient de tous ses traits un ensemble drôle.

— Monsieur de Rolleboise, dit Horatio, je vous présente mon ami sir James Cawdor, baronet. Sir James, monsieur Robert de Rolleboise.

Les deux hommes s’inclinèrent, et Robert s’assit en face de lord Mackinguss.

— Que buvez-vous, monsieur de Rolleboise ? lui demanda abruptement l’Anglais.

— Je ne sais ; quelque chose de fort. Qu’est cela ? fit-il en indiquant plusieurs bouteilles fiolées aussi vides que des bulles de savon.

— Oh ! c’est la boisson éternelle de ce buveur éternel. Sir James vient en France pour le vin de Bordeaux et retourne en Angleterre pour le rhum de la Jamaïque et le vin de Madère.

L’Anglais dont on parlait ainsi eut été sourd qu’il n’eut pas fait moins d’attention aux paroles définissantes de son ami. Le garçon venait de déposer devant le jeune Français une grosse bouteille, de ces bouteilles qu’on peut se jeter à la tête sans les casser, ayant une vaste étiquette comme on en voit sur les tôpetes de cirage anglais.

— Quelle est cette affreuse boisson noirâtre que vous me faites servir ?

— Il vous faut du tonique, on vous sert du stout. C’est un correctif utile pour les hautes circonstances.

Robert remplit son verre de la liqueur épaisse et noire à la surface de laquelle se forma une écume jaunâtre,