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le vampire.

et lente, s’animant au fur et à mesure qu’il parlait.

— De Rolleboise, ce que je vous dis ne sont point vaines paroles. Vous avez aimé la vicomtesse ; sans doute elle a blessé votre vanité, et vous vous redressez colère. C’est fort bien. N’est-ce pas, jeune homme, que la femme est une incarnation terrible quand on ne sait pas la dompter ?… N’est-ce point ce qu’il y a de plus lâche et de plus cruel dans le genre humain !… La femme qui, sans honte, toujours insulte et dont on ne peut jamais relever l’insulte !… Votre esprit ne s’est-il donc jamais révolté en considérant cette société où la femme est maîtresse et où l’homme est esclave… où devant une frêle enfant qu’une seule main broyerait, il est des hommes forts et puissants qui s’inclinent !… N’avez-vous pas frissonné souvent à l’idée de ces haines, de ces querelles qui, parfois, amènent la mort ! Dites, y avez-vous réfléchi une fois par de longues nuits de désespoir et de jalousie !…

— Les dernières spirales de l’enfer ne sont pas pires que les tortures que j’ai endurées sans bruit, sans râle, dans les ténèbres ?…

— Ah ! vous ne m’écoutez pas !… Eh bien ! jeune homme, sachez qu’il est un cercle dans lequel les choses ne sont pas ainsi. Là, la femme n’est pas une distraction, mais un but. Riche, vous en ferez un moyen de vengeance, pauvre, elle édifiera votre fortune. Au lieu de vous coucher faible aux pieds d’une maîtresse, vous la verrez implorante au-dessous de vous, et vous ne l’aimerez pas !…

— Mais, pour parler ainsi, vous n’avez donc jamais aimé, vous ?…