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le vampire.

indispensable à la société. On peut être très-honnête homme, excessivement docte, et ne lire jamais de romans. Ces pages s’adressent aux jeunes gens rêveurs, aux personnes loisireuses, pas à d’autres. Et, bien sûr, je serais énormément fâché qu’on perdit son temps à cause de moi. — Le roman est le beau sexe du monde des livres. Il faut savoir le fréquenter.

Mais me voilà très-loin du sujet de mon premier alinéa. Il serait l’heure de fermer la parenthèse. Toutefois, avant de continuer, et à propos de digression, je confesserai ceci qu’étant, par nature, quelque peu saccadé, il est possible qu’il m’arrive dans le cours de ce récit, alors que je me heurterai à quelque idée bizarre, de quitter un moment la grande ligne, pour parler digressivement et vagabonder dans un sentier de traverse.

On me reprochera peut-être encore d’employer trop souvent la première personne du verbe. Ce n’est point la vanité qui me guide en ceci. Mais, il me semble injuste et peu convenable qu’un auteur attribue à plusieurs, par un timide nous, les réflexions plus ou moins sensées, quelquefois grotesques, qu’il peut tirer au vol quand elles traversent son cerveau. Ensuite, un livre n’ayant qu’une signature n’a nécessairement qu’un auteur.

Le seul mérite de bien des écrivains secondaires est d’avoir été personnels dans leurs œuvres. Je promets néanmoins de ne tomber ici dans aucun excès d’intimité.


Bazas est une vieille petite ville qu’on rencontre à quelque dix lieues de Bordeaux, en allant vers les Pyrénées. L’aspect en est sale et morne. Des rues étroites, caillouteuses, assombries par des couverts, conduisent