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le vampire.

sur cette dernière œuvre. Vingt ans !… il m’a fallu vingt ans, Valérie, mais j’ai satisfait ma vengeance ! Ces honnêtes jeunes gens ne m’ont point deviné. Ils n’ont même point compris Nohé-Nahm. C’est pour eux une monstruosité, voilà tout !… Ah ! le sommeil me gagne….. le bon Nohé-Nahm va dormir.

Horatio se coucha. Cet homme, dont la figure se dessinera plus avant dans ce livre, avait, par une constante habitude des agitations morales, blasé pour ainsi dire son cerveau. Maître de lui-même, il arrêtait sa pensée comme on éteint une flamme. Horatio dormait comme le premier honnête homme venu.

Sur le tapis était couché le chien. Tout était nuit ; autrement on eût aperçu de temps à autre ses poils se hérisser sur ses reins, les ongles de ses larges pattes tourmenter la laine qui lui servait de lit.

Son souffle anhéleux, inquiet, se produisait par un renâclement sourd. — Ainsi que son maître nous l’a dit, Mont-Dore avait été mordu. Mais, ce qu’il était loin de penser, c’est que le chien qui l’avait attaqué était enragé.

Mont-Dore ressentait les premières atteintes du mal ; un accès le prenait. Et le sommeil emportait Horatio dans le monde fantastique des songes.

Le chien se dressa sur ses pattes avancées, la tête tendue, la gueule grinçante. Un instant il demeura ainsi immobile, ses flancs battant précipités. — Un frisson convulsif courut dans sa robe rude et le fit bondir contre la couche dont les rideaux fermés l’arrêtèrent. Néanmoins il demeura debout, les jambes de devant ap-