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le vampire.

bien garde de s’endormir. Heureux âge, où une fleur donnée, un pressement de main, un griffonnage un mouchoir, donnent la fièvre au cœur et chassent le sommeil !…

Ce même soir, Nohé-Nahm écrivit une lettre avec un soin singulier.

La journée du lendemain s’annonça au ciel magnifique. Dès le matin les préparatifs de la chasse occupaient palefreniers et piqueurs. Des chevaux pour les chasseurs et des voitures anglaises pour les quelques dames qui devaient suivre attendaient dans les cours. L’impatience des chiens ajoutait à celle du comte. On partit. Le lieu du rendez-vous était indiqué au milieu d’une plaine boisée, clair semée de landes. — Au plus animé de la chasse, le comte écarté s’arrêta pour s’orienter sur la voix de la meute qui, par moments, se perdait. Soudain un piqueur accourant au galop lui remit une lettre. Tout en laissant à son cheval son allure, le comte lut. Sa face s’empourpra, ses yeux se firent farouches, et avec un jurement formidable il s’élança au détour d’une clairière.

Mais Raoul s’occupait peu du loup que l’on poussait. Perdu dans une fougeraie close de la forêt, il savourait à loisir les joies que procurent un sentiment qui nait. Parfois, seulement, une pensée l’attristait. Car, cette ivresse n’aurait qu’un jour, et, le lendemain, il rentrerait dans la vie austère que vivait sa mère. Pauvre nature humaine, si excellente qu’elle soit, une bouffée d’amour la ferait presque ingrate !…

Tout à coup, sa rêverie fut troublée par l’arrivée de trois cavaliers, qui, débouchant d’une haie, se dirigèrent