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le vampire.

sée de pitié. Seulement, elle jugeait que moi étant plus élevée de taille qu’elle, le nœud coulant descendrait trop bas.

La salle de charpente où se préparait cet affreux drame, tout à fait démeublée, s’offrait nue au regard. La duchesse cherchait quelque chose. Ses yeux où reluisait l’ivresse furetaient l’ombre. Tout à coup elle découvrit, derrière le lit auquel j’étais liée, une vieille chaise de bois.

Elle quitta la table et ne s’inquiéta nullement de quelques bouteilles qui, renversées par sa robe, roulèrent à terre. Elle s’empara de la chaise et remonta sur son échafaud. Puis, se bissant sur ce vieux meuble, au moyen de plusieurs nœuds, elle raccourcit la corde.

Pardonnez-moi si je marche lentement sur ces détails, car je partage l’horreur qu’ils inspirent en vous, mais ils sont indispensables pour l’intelligence de cette épouvantable scène. Ma belle-mère était ivre, mais d’une ivresse dont l’exaltation presque éteinte la laissait abrutie. Pouvant à peine se maintenir sur son échafaudage, car le vertige lui troublait souvent la vue, elle se maintenait à la corde, l’instrument de mon supplice. Le nœud était ouvert. Machinalement, voulant l’essayer, elle y passa sa tête. Mais, dans le mouvement qu’il lui fallut faire, son équilibre fut perdu et son corps s’inclina en avant comme un sac plein qui se renverse. La corde la retint par le cou. Dans le mouvement qu’elle fit pour se redresser, la chaise sur laquelle portaient ses pieds glissa sur la table et tomba en entraînant la lampe. L’obscurité fut complète. Je lançai un cri.

La duchesse se trouvait pendue ; ses pieds ne tou-